J’étais celle que vous vouliez que je sois – Julieta Bivio

✒️ Julieta a le sentiment d’être mise à l’écart de la fonction qu’elle a exercée corps et âme pendant de nombreuses années. Ce cocon de sécurité qu’elle s’était confectionné de toutes pièces, à un prix exorbitant au niveau de sa vie personnelle, éclate en mille morceaux. Elle se retrouve, elle aussi, en mille morceaux sur le carrelage. « La bulle d’illusion dans laquelle tu vivais vient d’éclater. Illusion de penser que ton travail était ton identité. Illusion de considérer que tu étais invulnérable parce que tu étais arrivée là-haut. Illusion d’imaginer que le monde ne pouvait plus t’atteindre, que tu contrôlais ta vie, et qu’on ne pourrait jamais plus te blesser » (p. 24). Commence alors une descente en enfer, où elle se verra confrontée à des démons qu’elle pensait pouvoir oublier, car elle les avait rangés dans un coffre-fort blindé au fond d’un océan dont personne n’avait la carte, surtout pas elle.

Sa confiance candide, sa foi dans ses propres capacités l’ont plus d’une fois extirpée de situations inhumaines. Que ce soit chez sa grand-mère au Cap Vert, au Portugal chez sa mère et son beau-père, ou chez son père biologique à Paris, enfant, elle reste inexorablement en quête du cocon rassurant d’un foyer aimant. Elle n’aura pas la chance de faire cette expérience. Il lui reste la fuite en avant, dans les bras d’un homme qui l’aime pour de vrai. Ou du moins, c’est comme ça que l’histoire commence. Là encore, elle se voit confrontée aux feux de l’enfer. Alors elle plonge, loin, très loin. Parce qu’elle espère longtemps, très longtemps, qu’elle arrivera à régler les problèmes avec celui qui les crée. Elle a failli y croire trop longtemps tout en s’anesthésiant pour ne plus souffrir, au sens littéral comme au figuré.

J'étais celle que vous vouliez que je sois - Julieta Bivio

Au détour d’une conversation incongrue, elle comprend qu’elle doit à nouveau s’extirper de cet enfer, et qu’elle devra le faire de sa propre volonté. Car personne ne peut te sauver malgré toi… Elle doit se montrer forte pour vivre la vraie vie. Très forte.

L’on pourrait croire – espérer ? – qu’un tel cheminement lui donne tous les éléments pour cultiver l’estime de soi. Et puis finalement, c’est là que le bât blesse le jour où elle perd cette place qu’elle a si durement méritée. Elle croit avoir l’estime de soi, mais celle-ci dépend en réalité des autres. Cet événement bouleversant va la mener enfin vers une véritable estime de soi : celle qui émane d’elle, parce qu’elle apprendra à affirmer qu’elle a de la valeur.

📓 Ce récit poignant de vérité m’a littéralement happée. Je ne voulais plus qu’une chose : rester plongée dans l’histoire de cette femme qui a la niaque. A chaque rebondissement, je me demandais comment elle allait faire pour se relever.

J’étais là, lectrice envoutée, en supporter affamée d’une fin heureuse. Pourtant, les embuches auxquelles Julieta se voit confrontée laissent plutôt croire qu’elle sombrera, tôt ou tard. Qui ô qui survit à tant de cauchemars, en une seule vie ? Une femme qui a la niaque…

J'étais celle que vous vouliez que je sois - Julieta Bivio

💗 Les blessures profondes dont nous parle l’auteure la mènent a changer de perspective dans son récit. Elle parle tantôt à la première personne, tantôt elle s’adresse à elle-même en utilisant la deuxième personne. Ce retournement de perspective est en phénomène que je connais bien de l’intérieur : il permet d’appréhender des situations qui sont indicibles, au départ, à la première personne. Il permet aussi de puiser au plus profond de soi pour remonter à la surface de son être revigorée, plus puissante que jamais.

🦄 Pour écrire cette histoire-là, il faut un courage sans bornes. Oser une telle fragilité tout en faisant ressortir une telle puissance, c’est un récit qui se crée jour après jour. Des ressemblances troublantes m’ont frappée tout au long de ma lecture : je récite des passages entiers du Petit Prince de mémoire, j’ai un sentiment comparable de n’appartenir à aucun milieu, les apprentissages sur ma route m’ont souvent fait souffrir parce qu’ils se greffaient sur des plaies, j’avais aménagé mon confort au coeur même de l’inconfort. Il faut du temps et de la persévérance avant de se détacher, non pas pour ne plus rien posséder, mais pour que plus rien ne nous possède… Une multitude de phrases et de pensées résonnaient lors de ma lecture, comme si le livre n’était pas écrit sur du papier blanc, mais sur des feuilles de miroir.

J'étais celle que vous vouliez que je sois - Julieta Bivio

Mon histoire est bien différente sur de nombreux points, mais ô combien similaires sur de nombreux autres. Un passé qui est devenu mon lieu de référence, après un long cheminement.

❄️❄️❄️❄️❄️ Je recommande vivement ce livre à toutes celles et à tous ceux qui sombrent, se demandent s’ils atteindront un jour les tréfonds de l’horreur, ce point le plus bas où l’on trouve appui en soi-même pour rebondir, remonter lentement mais surement jusqu’à la surface, percer le noir de la vibrante lumière que l’on a enfouie en soi. Et puis si vous avez vous, un cocon de confort véritable, si vous avez grandi dans un tel cocon, ce livre vous permettra d’entrevoir ce que vivent ceux qui en sont orphelins. Vibrant de sincérité et de fraicheur, malgré les thèmes pesants qui passent nécessairement la revue, Julieta nous raconte une histoire pleine d’espoir, malgré tous les désespoirs qui la traversent.

Ne passez pas à côté de ce récit !

Retrouvez le livre sur le site de Julieta Bivio.

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